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Trollage, Vietnam et Honda Dream
19 avril 2014

Ce que pourrait en écrire Michel H.

500 000 dôngs

100 000 dôngs

Pour 600 000 dôngs : racheter, après négociation, son passeport volé à un intermédiaire chez qui la malhonnêteté le dispute à la bêtise.

Le 6 juillet 2013 tombait un samedi. C'est à 14h30 que Patrick Chazay descendit de l'avion Air France qui l'avait mené en 12 heures de Paris à Hô-Chi-Minh Ville. Le service à bord avait été assez dégueulasse et il était fatigué. A la sortie de l'aérogare, il lui fallut quelques secondes pour se réhabituer à l'humidité et trouver le chauffeur qui devait l'emmener au Bon Sen Hotel 2.

Dans le taxi, la vision de la rue hystérique et sale lui rappela qu'il voyageait dans un pays de socialisme sauvage, où la dépossession de biens matériels était un risque structurel garanti par une législation floue, où le système bancaire fragile était dans les mains de familles étatiques puissantes.

A l'hôtel, il se doucha, défit ses affaires, prit une bouteille de Vodka Hanoi dans le mini-bar et, allongé sur le lit, parcourut le Guide du Routard. Il se décida pour un programme ballade en centre ville, qui lui permettrait, d'après le guide, de visiter l'essentiel des vestiges de la période coloniale. Puis il chercha l'adresse d'un bar à hôtesses mais ne trouva rien sinon la mention décevante d'une boîte de nuit, l'Apocalypse Now,un peu moins glauque que par le passé mais toujours une proportion de gogo girls, parties à la pêche à l'expat”. Il enfila un bermuda et un tee-shirt Chang Beer acheté en Thaïlande, glissa son argent dans une poche ventrale, puis sortit.

La rue Hai Ba Trung était écrasée de chaleur, balayée par un flux incessant de motos, et rien ne semblait en valoir la peine. Des vendeuses de billet de loterie, de soupes, de cigarettes, des cireurs de chaussures l'interpellaient. Le mois de juillet constituait au Vietnam un pic de fréquentation touristique. En 2010, 5 049 855 touristes étaient passés par Ho-Chi-Minh Ville.

Chien couché

Après quelques minutes de marche dans les rues bruyantes du centre-ville, il lui sembla qu'elles étaient toutes identiques et il entra dans un shopping center sur lequel il lut Saïgon Square 2.  Il progressa dans des allées étroites où il se faisait bousculer, parmi les boutiques miniatures dans lesquelles des vendeuses se vernissaient les ongles des pieds, enfin il s'arrêta devant un magasin de sacs à dos dont la propriétaire vêtue d'un pyjama avait un air de maquerelle, mais il se dit que beaucoup de Vietnamiennes pouvaient produire le même effet. Il détailla un sac qu'il avait auparavant repéré au Vieux Campeur. Fabriqué en macroLite Duratex, de couleur titan anthracite, ce Deuter traveller 70 + 10 était pourvu d'un sac d'appoint amovible, équipé d'une ceinture lombaire ergonomique, d'un cadre en X et de courroies internes de fixation. Ce qui lui plaisait surtout, c'était le système de portage escamotable sur le dos avec Vari Quick, et qui permettait d'en faire alternativement un sac à dos ou une valise. Il fut déçu de constater qu'il s'agissait d'un faux et s'en alla, sans que la vendeuse ne le regarde jamais.

Epuisé par la foule, il monta dans un taxi et lui demanda de rouler vers Go Vap, un arrondissement périphérique dont il avait lu le nom sur une carte, dans l'espoir d'y trouver plus de calme. Une fois parvenu là-bas, le chauffeur se retourna vers lui, et comme Patrick ne savait pas où aller, il lui fit signe de s'arrêter. La nuit était tombée sur cette banlieue sale, couverte de néons dans laquelle les silhouettes indistinctes des motos et l'éblouissement de leurs phares ajoutaient à sa confusion. Il se réfugia au premier étage d'un restaurant. Après un premier quart d'heure calme à manger des arachides fraîches et boire de la bière, un groupe d'hommes rougeauds en tenue de bureau s'installa non loin de lui – leur saleté le plongea dans un effarement à peine atténué par la fatigue. Mangeant goulûment, riant très fort bouche ouverte en projetant autour d'eux des parcelles de nourriture, crachant par terre, se mouchant entre leurs doigts – ils agissaient en tout absolument comme des porcs.

Ce soir là, il se rendit à l'Apocalypse Now. Devant la boîte de nuit, il observait les jeunes femmes vêtues d'espèce de choses destructurées et se sentit confusément trop vieux. Renonçant donc à y passer la soirée, il marcha au hasard de la nuit tiède, entrant machinalement dans une boulangerie. La menu qu'on lui présenta proposait des pâtisseries japonaises. Il en commanda en grand nombre et s'en gava, à la limite du vomissement ; enfin il entra dans un salon de massage et se fit faire une pipe avant de rentrer se coucher. C'était probablement mieux ainsi.

Cigarette

                                                                                                                                       © Công

Phrases et tournures empruntées aux “Particules élémentaires” et à “Plateforme”.

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